vendredi 29 décembre 2017

"La pluie d'hiver sur les carreaux..."

C'était dans mes lointains souvenirs, la première phrase d'une chanson . Richard Antony ? Sacha Distel ? Qui connait encore ces noms ? Certes ce n'était pas le paléolithique....Mais c'est si loin...

Bon  c'était pluie d'hiver sur les carreaux. Quand j'ai fermé ma fenêtre pour écarter l'hiver et garder bien au chaud la chaleur de la maison, j'ai été surprise de ce qui tombait du ciel.
Quoi donc ? Mais la pluie!
Dont on avait oublié le nom et le bruit dans nos terres sèches du Midi.
Tellement de jours sans eau, sans pluie.
Et voilà qu'elle habille mon jardin, ma rue, mes carreaux, qu'elle tapisse mes papilles d'un parfum inoubliable, inoublié, mais toujours retrouvé avec bonheur.


 La pluie a mille visages, mille parfums. Qui vont ensemble.

Il y a la pluie d'été chaude, tiédasse, violente, qui fait fumer les routes, la terre,  et dépoussière d'un grand coup les feuilles. Toutes les feuilles.
Il y a la pluie océane très rare, que je rencontre en montagne, presque invisible et qui en cinq secondes vous trempe jusqu'aux os, celle de la littérature qui mouilla sous la plume d' Alejandro Perez Lugin (fin 19 eme) Santiago de Compostela  de façon inaltérable, inaltérée depuis. Un magicien des mots. Un monument littéraire que cette "Lluvia en Santiago" qui n'est autre qu'une pluie océane mais  qui étoila ma découverte de St Jacques de Compostelle, voilà près d'un demi siècle, d'un voile magique.

Et puis il y a la pluie d'hiver...Celle qui s'abattit sur mon village.
Quand je fermai ma fenêtre, ce fut un parfum qui me sauta au visage ; celui qui aurait pu enrober la nuit mouillée, mais on n'était pas encore à la nuit. C'était tout à la fois la terre mouillée, l'herbe mouillée, la pierre mouillée et l'asphalte mouillée. Quel mélange...quel parfum !
Alors j'ai enveloppé ce parfum d'images et de couleurs.
Celle du frileux bougainvillée qui attend sa dernière heure et la mienne sans doute. Plus de trente ans qu'il végète, plus de trente ans qu'il perdure. Au nom de quoi ?


Celle des dernières roses malmenées par le vent  mais qui gardent un parfum subtil contre lequel le vent ne peut rien.



Et puis la terre qui exhale rarement son parfum, le gardant jalousement.
Mais la pluie devenait granuleuse de grésil, étoilée de flocons. Cela changeait tout. Cela magnifiait le parfum, cela magnifiait le grand cyprès de mon jardin d'un reflet mouvant sur ma fenêtre détrempée.
Reflet du cyprès

Je pris ensuite la route pour des besognes très banales et ma route s'obscurcit.

Les roseaux s'allongeaient vers le sol, craquant sous le vent violent. Comme cliquettent les mâts des voiliers dans les ports désertés.


Les grands chênes pleuraient leurs feuilles sur les vignes, sur les flaques, tandis que les petits gardaient les leurs, jalousement, pour un temps encore.







Derrière les cyprès de la colline, le Canigou s'était éclipsé.





L' après midi il avait chaussé des pantoufles de blanc duvet.
Là, au soir, il avait disparu ...Jouait il les Rois du Shopping à la recherche de la tenue idéale pour Malin d' Hiver ?
Ce serait le prochain Matin qui nous le dirait...J'avais hâte d'être au lendemain pour découvrir ce Roi là.
Ce matin, le voici, estompé par la neige. Il continue sa tournée des Rois du Shopping...








De quelle tenue nous reviendra t'il paré après la prochaine pluie glacée, 
celle d'hiver sur mes carreaux...




Finalement, c'était Sacha Distel...


"La pluie d'hiver sur les carreaux
Frappait ses gouttes d'eau
La pluie d'hiver sur les carreaux
Jouait un air de banjo...."


mercredi 22 novembre 2017

Fabert, un parfum d'enfance retrouvée

On ne passe pas à Fabert, personne n'y passe, jamais. On y va si seulement on fait attention à ce petit embranchement discret, en plein virage, si exigu qu'il faut faire une manoeuvre pour s'y engager. Alors on se retrouve sur une étroite piste cimentée de 2 km où le demi tour est impossible. A cette condition là on est obligés d'arriver à Fabert.

Fabert c'est un "veinat", un hameau, le premier lieu habité à 6 km de la frontière, en descendant du Col d' Ares. Le premier lieu habité d'Espagne, plus précisément de Catalogne.



Habité c'est beaucoup dire : 2 habitants! Les mêmes sans doute qu'en 2013 lorsque j'avais découvert ce hameau perché à 1385 m d'altitude mais bien abrité des vents glacés du nord qui, une fois passée la frontière, se ruent sur un plateau où nul arbre ne les arrête. Un plateau à 1500 m dont la chute brutale protège le village de leur souffle puissant et corrosif.



Bien abrités 

Fabert et ses maisons de schiste regarde résolument le sud. Et se chauffe au soleil.

Des fleurs s'attardent encore c'est bien abrité, pourtant une poussière de neige est tombée voilà quelques jours.






















Une petite place en pente accueille seulement 3 véhicules. Une fontaine munie d'un robinet de cuivre y distribue une eau fraîche et sur les pierres de schiste sont écrits les noms du village, de la place  et de ses maisons : un original carnet d'adresses !




Carnet d'adresses



















Je loge mon camion en pente, je cale une roue avec un roc: mon hôtel restaurant est prêt.
Il y a du monde au village : les habitants ont doublé ou triplé, c'est dimanche.
Je vais me présenter : un intrus qui envahit les lieux, ça se remarque ! L'accueil est chaleureux, l'hospitalité n'est pas de façade. C'est l'hospitalité Catalane. Je me verrais bien passer Noël ici...
Je fais un petit tour dans le hameau ce qui est vite fait : la rue principale est interdite et si d'aventure, comme moi, on tente la chose, on bat vite en retraite: des molosses jaillis d'une cour sautent le mur et foncent droit devant. J'essaie de faire bonne figure mais on en reste là...

Chemin privé
Chiens dangereux

La rue interdite

Je préfère de loin la basse cour qui investit la rue: plumes colorées et brillantes de bonne santé, verbiage et caquetage empressé, ces dames donnent du bec sur tout ce qui traîne. Maître coq se partage entre nourriture, cocoricos puissants et croupion de ces dames, lesquelles n'affichent pas le parfait accord. Nina ouvre des yeux effarés et terrifiés devant ces monstres inconnus : où l'ai je emmenée? Son calvaire va t'il commencer ?







Elle finira par s'habituer mais au moins n'aura aucune velléité d'escapade. A propos d' escapade, c'est l'heure de l'apéritif, le soit tombe et la température aussi. Frédérique m'a offert une bouteille d' Escapade, sa nouvelle cuvée de muscat sec, millésime 2017.

La bouteille , son millésime et
le mimétisme du paysage le lendemain


Nina et les volatiles sont aussi à l'heure de l'apéro, solide celui ci.








 Il fait 5° il faut se réchauffer.
Tout là haut les vaches sont encore aux estives, le temps est assez chaud pour cela. Seuls les veaux sont au hameau: entre chats, chiens et autres, le hameau est fort peuplé ce soir.



Les poules rentrent au bercail, encouragées par les cris de la fermière mais un petit groupe indocile a pris le large : sur ma délation, la fermière va les chercher, elles filent doux.



Tout le monde s'active: on soigne les veaux dans le pré en plein hameau, il y a un parfum de montagne et de vie animale. Un parfum d'enfance soudain retrouvée.
Il n'est que 17 h 15 mais le soleil a passé dans un poudroiement d'or qui virera plus tard au rouge.






 Les 5 ° ambiants se ressentent avec une soudaine acuité. Les sonnailles des lointaines vaches vibrent dans l'air froid, tandis que le silence s'installe.


Chacun regagne son intérieur, j'en fais autant. Les chiens commencent leur veille, on ne les entendra plus.


Confort douillet, chauffage, la soirée d'automne en montagne a une atmosphère qui fait frissonner quand j'y pense à la maison, mais qui me plait tant quand je la vis. Vue de loin, c'est triste et angoissant. Vécu de l'intérieur c'est fort plaisant.

Un peu plus tard, le village se vide : tous les habitants sauf un s'en vont à la fête du village voisin, Mollo. C'est la Ste Cécile. Ils viennent me prévenir et m'assurer (ou me rassurer ? ) : "On ne rentrera pas tard" , comme si j'étais un membre de la famille; je trouve cela touchant et amusant. "Je vous garderai le village" je leur réponds en riant. En fait nous serons deux, qui ne nous rencontrerons pas. Quand les habitants reviendront, "pas tard" effectivement, Nina et moi nous sommes déjà sous la couette, dans la chaleur du chauffage qui ronronne.
Puis la nuit s'étendra sur le hameau : le bruit immobile du silence, ce bourdonnement des oreilles que nul autre bruit ne vient troubler. Le silence immense et un ciel d'encre éclaboussé d'étoiles.
Au matin, je me lève sans bruit, le hameau se réveille doucement, Josep vient me saluer, il part travailler de l'autre côté de la frontière, je ne le reverrai pas. Lorsque je m'élance sur le chemin, la basse cour dort encore. Je n'entendrai pas le chant matinal du coq, celui qui signait mon enfance retrouvée.




Sur mon blog "Les balades de Lison", la randonnée est contée,(clic) le long de la frontière



mercredi 18 octobre 2017

C'était en septembre...en Pays de Sault

Mon blog "Les balades de Lison" raconte le Pays de Sault donc je conterai juste la balade avec "grand chat" : Mathurin, mon unique compagnon de ce jour là.

Ce jour là je fêtais mes 67 ans et allai les fêter loin de chez moi, en compagnie de mon chat voyageur et de la douleur, ma proche compagne depuis des jours.

J'avais choisi pour ce faire une tranquille vallée du Pays de Sault, celle qui passe juste en son coeur. Et qui est, pourrais je dire, ma "vallée de coeur".
Je l'avais contée au tout début de mes premiers pas de blogueuse. Ici même en un clic.
Dans ce billet de printemps, je contais le fil de l'eau de ce cours d'eau nommé Rebenty qui donne un indéniable goût de Revenez-y.
Pour l'heure nous avons dépassé Marsa  et Joucou, les deux villages de l'aval de la vallée.

Gorges du Rebenty : tunnels de Joucou
La route et les tunnels datent de 1867

Ruine du château d' Able ( 6 eme siècle - détruit en 1572)
Domine la rivière de 300 m et avait un moulin sur la rivière




Le pont dit "romain" qui était le seul passage
 pour relier Joucou à l'amont de la vallée
avant percement de la route et des tunnels

Dans la rivière, avant ce tunnel, à l'aplomb du château
se trouve la ruine du moulin farinier
mentionné déjà en l'an 873. Un pan de mur peu visible

Début septembre c'est encore l'été , la douceur de la moyenne montagne, l'appel des eaux fraîches et vives, le tumulte somptueux des fleurs, disons la débauche de leurs couleurs.
Que cherchais je alors, au coeur de la douleur qui taraudait ma jambe et qui gardait encore les mystères qu'elle a perdus aujourd'hui ? Sans disparaître toutefois pleinement : quel parasite !

Le Rebenty paisible


Je cherchais juste à me délasser, à quitter mon chez moi et ma chambre, à changer mes idées de place faute de changer celle de la douleur.

Mathurin le comprit bien, qui se porta volontaire pour m'accompagner Nina ne voulant pas de ça.
Donc ce grand chat blanc qui louche allègrement allait devenir mon précieux compagnon, attentif et discret.

Le Rebenty, cette rivière du coeur du Pays de Sault, je voulais la suivre de plus près, rester au contact de son eau et de sa musique. Belfort sur Rebenty devient mon port d'attache pour la nuit. Je ne vis pas de prime abord la petite aire discrète en bord de rivière mais mon emplacement aussi bien surveillé nous octroya une nuit calme .

Ma chambre à Belfort / Rebenty

Détails  et gros tronc d'arbre, ils étaient deux, très vieux, sciés au pied de la croix.


Mes pas étaient hésitants et souffrants. Ils me permirent toutefois de visiter le village , le matin revenu.
Un petit canal devenu inutile alimentait jadis la scierie toujours en activité : nous sommes au Pays des Sapins. Le canal passe dans le village auquel il donne une touche bucolique  si besoin encore en est...

Presque au départ du canal

Le canal dans le village

La scierie de nos jours

Détail en rue

Au cimetière..poésie

Ancienne fontaine

Belfort croule sous les fleurs


Ensuite je quittai un peu la vallée pour monter sur le plateau : Sault est avant tout un plateau. Rodome est un de ses villages, le style village de France profonde avec ses prairies dans un décor de collines, son clocher pointu, ses fontaines abreuvoirs, et ses petites pommes sauvages. Le Soularac sévère veille de loin.

Le Soularac : 2368 m, en Ariège



Rodome : pays de Sault, Aude

La nouvelle église de Rodome 

Le nouveau clocher et l'ancienne église

Une rue  : Rodome

Petites pommes acides (car vertes) et délicieuses
d'un des pays de la pomme




Abreuvoir à Rodome


Rodome : cimetière et ancienne église

L'arrachage des pommes de terre débutait sur le plateau et je guidai mon camion au village de Galinargues, proche de Rodome où tout semblait figé sauf la bergère qui poursuivait son troupeau rebelle.Les chèvres ne sont pas de paisibles moutons. Elle en faisait les frais avec son pas coursé.

Deux bergères et leur troupeau de caprins



Galinargues


Je ramenai avec plus de facilité mes roues et mon chat en bord de Rebenty où après quelques pas hésitants dans l'eau trop froide, je m'accordai un chaleureux repas. Anniversaire oblige, mon chat en profita; après quoi un triathlon allait de soi. Pour chat, s'entend : marche, course et escalade furent aussi bien appréciées, pour preuve, grognements et coups de dents au retour au camion.


Apéro de chat


Sport de chat



Course féline
Digestif de guêpe


Une sieste au chaud arrangea tout le monde (lui et moi) avant que de pousser à Niort (de Sault celui ci) discret, posé en fond de vallée et tout en long.
Sieste après le sport



D'un côté un Rebenty sage et canalisé, de l'autre quelques fontaines en folie.

Niort de Sault (Aude)






















Serge, rencontré ici était prolixe : il m'emmena visiter le cimetière où les morts devinrent fort vivants sous sa verve, de par leur histoire, puis le village et ses maisons closes (au sens littéral du terme) avant que de me présenter les arbres environnants que je connaissais toutefois, et de m'inviter là où je ne pourrai aller: la transhumance des vaches fin octobre.
Mais il y aura encore des octobre et toujours des vaches transhumantes, si je suis encore là.


D'hier...

Un art que j'aime beaucoup








































Allez Mathu, c'est beau tout ça mais il y a de la route !

Je baisse la tête

Où tu m'emmènes dis ?

Enfin je peux me reposer

Sur mon autre blog : "Les balades de Lison" un autre article sur le Pays de Sault  en un clic